Pour une lutte contre la pandémie démocratique et planifiée

Mercredi 31 mars, le Président de la République M. Macron annonçait de nouvelles mesures contre la pandémie du Covid19 ; ces annonces sont désolantes pour nous militants écosocialistes et insoumis. Nous soutenons qu’une autre politique est possible contre la pandémie, celle défendue à l’Assemblée nationale par les députés de la France Insoumise et notre candidat à l’élection présidentielle Jean-Luc Mélenchon -une politique qui repose sur la démocratie et la planification, comme nous allons l’expliquer dans ce qui suit.

Des mesures inconséquentes et liberticides

Il est vrai qu’il semble d’abord y avoir une bonne nouvelle. M. Macron annonce que grâce à la mobilisation de la réserve sanitaire, il y aurait prochainement des milliers de lits supplémentaires, jusqu’à atteindre dix mille : si c’était vrai, nous ne pourrions que nous en réjouir ; cependant, lorsqu’on se rappelle qu’il y a un an, le Ministre de la santé M. Véran annonçait un objectif de quatorze mille lits alors que non seulement ils n’ont pas été créés dans l’intervalle mais que certains ont même été supprimés, il y a de quoi être dubitatif ! Qu’est-ce qui a pris autant de temps ? Pourquoi ne pas avoir commencé à former des soignants et faire produire du matériel dès le début de la pandémie ? Et pourquoi les gouvernements néolibéraux successifs ont-ils détruit l’hôpital public, pour commencer ? Pour notre part, le programme que nous défendons, L’Avenir en commun, proposait dès 2016 de revenir sur les suppressions de lits d’hôpitaux et d’engager un plan pluriannuel de recrutement de médecins, infirmiers, aide-soignants et personnels administratifs pour les hôpitaux.

Faute de système hospitalier capable de faire face à la pandémie, puisqu’il était déjà en grave difficulté avant même le début de celle-ci, M. Macron et son gouvernement continuent à nous imposer des mesures liberticides dans le but de ralentir la circulation du virus : un couvre-feu écrasant la vie sociale et culturelle et une restriction des déplacements, en l’occurrence à dix kilomètres. Nous voilà enfermés par nos gouvernants, et c’est pour contrer les ravages de leurs propres politiques d’austérité ! L’efficacité de ces mesures est discutée, il est à craindre qu’elles ne couvrent pas l’essentiel des foyers de contamination en plus d’être oppressantes. Du reste, le Président de la République en revient tout bonnement à la mesure qu’il avait prise dans la pagaille de mars 2020 : fermer les écoles. La mesure est sans doute plus efficace que ces couvre-feu sans fin, mais enfin, il va bien falloir déconfiner un jour, ne serait-ce qu’au regard de situations psychiatriques menaçantes ! N’y a-t-il pas mieux à proposer à présent que la méthode médiévale du confinement ?

Nous pensons que si : la politique défendue par la France Insoumise.

Nos députés, et en particulier Jean-Luc Mélenchon qui l’a plusieurs fois répété dans les médias, n’ont cessé de défendre une autre politique : organiser une rotation globale dans les entreprises et les lieux d’enseignement, ce qui nécessiterait de recruter des assistants pour les professeurs afin de pouvoir dédoubler les classes, pour que les gens puissent vivre tout en se croisant le moins possible ; défendre le passage des vaccins en licence libre comme plusieurs pays l’ont demandé à l’Organisation Mondiale du Commerce, car nos vies valent plus que les profits des laboratoires ; réquisitionner des entreprises pour fabriquer le plus vite possible tests, masques, gants, bouteilles d’oxygènes, machines à purifier l’air, et donc vaccins. Tout cela relève du bon sens le plus élémentaire ; or, non seulement ces mesures ne sont pas prises, mais elles ne sont même pas débattues hors des interventions de nos députés ! Comment cela est-il possible ?

Une gestion de la pandémie antidémocratique

C’est que la façon de prendre les décisions ne vaut guère mieux que leur contenu : la Vème République est en pleine dérive autoritaire. C’est la monarchie présidentielle qui s’applique face à la pandémie : notre vie sociale et culturelle, y compris dans ses aspects religieux, la possibilité de travailler pour les professionnels de la culture, la survie économique de nombreux commerces et indirectement l’économie toute entière, tout cela est suspendu aux décisions prises par un seul homme, le Président de la République. L’avis des spécialistes en épidémies est jugé inutile, le chef de l’État est paraît-il devenu un épidémiologiste confirmé -nous voilà au bord du culte de la personnalité ! De débat au parlement, il n’y a point : nos députés sont seulement invités à venir voter les mesure le lendemain sans pouvoir les amender ; tous les groupes parlementaires d’opposition ont boycotté cette mascarade pour cette raison. Dans quelle démocratie une telle concentration des pouvoirs sur un seul homme est-elle possible ?

Nous n’avons pas à dépendre des décisions d’un seul homme, quel qu’il soit ; nous sommes des citoyens, pas des sujets, et c’est de nos vies et de nos libertés qu’il s’agit. Nous ne voulons pas d’une monarchie. Les mesures contre la pandémie doivent être débattues à l’Assemblée nationale, où nos camarades députés ont multiplié les propositions alternatives. C’est le rôle du parlement. Et nous pensons qu’il faut aller au-delà, que toutes et tous les élus doivent pouvoir être révoqués, que les institutions politiques doivent être repensées pour que le pouvoir soit exercé par le peuple : c’est pourquoi nous défendons l’idée de convoquer une assemblée constituante pour une VIème République dont les règles ne soient pas écrites par les professionnels de la politique. Les institutions de la Commune, dont nous fêtons à présent les cent cinquante ans, donnent une image de ce à quoi elle pourrait ressembler !

C’est à cause de ce régime politique coupé des citoyennes et citoyens, où le pouvoir est concentré sur l’exécutif, que la gestion de la crise nous est imposée sans débat sérieux. Mais pourquoi M. Macron et son gouvernement n’envisagent-ils pas les mesures que nous défendons, surtout alors que les leurs échouent lamentablement ?

L’impuissance de l’économie de marché face à la crise

C’est que toutes ces mesures impliquent une planification de l’économie : elles nécessiteraient que l’État dirige une concertation entre les services publics et les entreprises pour mettre en place une organisation de la société par roulements ; qu’il organise la production du matériel médical dont nous avons besoin plutôt que de laisser faire le marché sans aucune organisation. Dans un dogmatisme économique qui dépasse même les intérêts de classe qu’ils défendent, le Président de la République et le gouvernement s’accrochent à l’idée que le marché peut résoudre tous les problèmes d’une société sans qu’un plan soit nécessaire, comme s’il était une sorte de force omnisciente et parfaite, correspondant à l’intérêt général sans même qu’on ait besoin de faire quoi que ce soit pour le rechercher !

C’est inepte : dans une économie capitaliste fonctionnant avec un marché libre, la seule chose qui guide la production est la recherche du profit, or il n’y a aucune force magique qui fasse correspondre ce profit à l’intérêt général de la société -ce n’est pas le sens que l’économiste écossais Adam Smith donnait à sa fameuse « main invisible » souvent citée. Le profit est la partie de la valeur d’un produit que s’accaparent les capitalistes grâce à la différence entre la valeur du produit et celle de la force de travail et des moyens de production qui ont permis de le créer, cette partie peut être grande ou petite suivant le produit et les conditions de production ; un produit peut très bien rapporter beaucoup d’argent aux capitalistes et n’avoir que peu d’utilité pour la société, comme un nouveau smartphone à peine différent des précédents, tout comme il peut être très utile à la société et rapporter peu d’argent aux capitalistes ! Et c’est ainsi que nous manquons de vaccins, de purificateurs d’air ou encore de masques FFP2 : le besoin que nous en avons ne correspond pas au profit qui peut en être obtenu dans une économie de marché, tandis que nous croulons sous des marchandises qui ne sont pas de première nécessité que la publicité cherche désespérément à nous vendre. La production est alors désordonnée, chaque entreprise produit en fonction d’un profit escompté plutôt qu’en fonction des besoins de la société ; c’est cette situation que l’on appelle l’anarchie productive.

Comment sort-on de là ? Par une planification de l’économie au service de l’intérêt général. Et pour qu’elle soit au service de l’intérêt général et non à celui d’une bureaucratie, il faut qu’elle soit démocratique : planification et démocratie se complètent mutuellement.

Cela ne s’applique évidemment pas qu’à la pandémie, qui finira bien un jour -même si cela ne sera pas grâce à la politique de M. Macron ! Il en va de même de la gestion des crises économiques, et à ce titre, si les crises de surproduction sont un phénomène régulier sous le capitalisme, on est en droit d’être particulièrement inquiet des nombreux licenciements actuels, comme à General Electric ou à Danone, la chute de la demande avec la pandémie risquant de précipiter dans l’abîme l’énorme bulle spéculative de la finance actuelle ; il en va de même, surtout, de la catastrophe écologique dans laquelle nous ne cessons de nous enfoncer. C’est à ce chaos que nous conduit le capitalisme ; face à lui, nous avons besoin de l’organisation de l’écosocialisme.